Sœur Catherine Bourgeois + Ermite catholique, peintre

 

Sermon de saint Augustin, évêque

Sermo Guelferbytanus 16, 1-2 : PLS 2, 579-580

Voici que de nouveau le Seigneur apparaît à ses disciples après sa résurrection ; il interroge Pierre et il oblige à affirmer trois fois son amour celui qui par peur l’avait renié trois fois. Le Seigneur est ressuscité dans la chair, Pierre dans l’esprit ; car tandis que le Christ mourait en souffrant, Pierre était mort en reniant. Le Seigneur Christ ressuscite d’entre les morts ; il ressuscita Pierre de son amour. Il l’interrogea sur son amour et il lui confia ses brebis. Mais que procurait Pierre au Christ du fait qu’il aimait le Christ ? Si le Christ t’aime, c’est profit pour toi non pour le Christ ; et si tu aimes le Christ c’est profit pour toi, non pour le Christ. Cependant le Seigneur Christ voulait montrer comment les hommes doivent montrer qu’ils aiment le Christ : il l’a fait clairement en mentionnant ses brebis : M’aimes-tu ? Je t’aime. Pais mes brebis. Aimons-nous et nous aimons le Christ.

Si tu n’aimes pas ton frère que tu vois, comment peux-tu aimer Dieu que tu ne vois pas ? En aimant les brebis montre que tu as l’amour du pasteur ; car les brebis elles-mêmes sont les membres du pasteur. Pour que les brebis puissent être ses membres il a daigné être brebis ; pour que les brebis soient ses membres il a été conduit à l’immolation comme une brebis ; pour que les brebis soient ses membres, il a été dit de lui : Voici l’agneau de Dieu, voici celui qui ôte le péché du monde. Mais il y a une grande force dans cet agneau. Veux-tu savoir quelle force s’est révélée dans cet agneau ? L’agneau a été crucifié et le lion a été vaincu. Voyez et considérez avec quelle force le Seigneur Christ gouverne le monde lui qui par sa mort a vaincu le diable.

Aimons-le donc, n’ayons rien de plus cher que lui. Croyez-vous donc que le Seigneur ne nous interroge pas ? Pierre fut-il le seul à être interrogé et pas nous ? Quand on lit ce passage chaque chrétien est interrogé dans son cœur. Quand tu entends le Seigneur dire : Pierre, m’aimes-tu ? Prends-le comme un miroir et là regarde-toi. Car Pierre lui-même était-il autre chose que la figure de l’Église ? Aussi quand le Seigneur interrogeait Pierre, c’est nous qu’il interrogeait, c’est l’Église qu’il interrogeait.

Du livre des Actes des Apôtres

Ac 6, 1-15

En ces jours-là, comme le nombre des disciples augmentait, il y eut des murmures chez les Hellénistes contre les Hébreux. Dans le service quotidien, disaient-ils, on négligeait leurs veuves. Les Douze convoquèrent l’assemblée des disciples et leur dirent : « Il ne sied pas que nous délaissions la parole de Dieu pour servir aux tables. Cherchez plutôt parmi vous, frères, sept hommes de bonne réputation, remplis de l’Esprit et de sagesse, et nous les préposerons à cet office ; quant à nous, nous resterons assidus à la prière et au service de la parole. » La proposition plut à toute l’assemblée, et l’on choisit Étienne, homme rempli de foi et de l’Esprit Saint, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, prosélyte d’Antioche. On les présenta aux apôtres et, après avoir prié, ils leur imposèrent les mains. Et la parole du Seigneur croissait ; le nombre des disciples augmentait considérablement à Jérusalem, et une multitude de prêtres obéissaient à la foi. Étienne, rempli de grâce et de puissance, opérait de grands prodiges et signes parmi le peuple. Alors intervinrent des gens de la synagogue dite des Affranchis, des Cyrénéens, des Alexandrins et d’autres de Cilicie et d’Asie. Ils se mirent à discuter avec Étienne, mais ils n’étaient pas de force à tenir tête à la sagesse et à l’Esprit qui le faisaient parler. Ils soudoyèrent alors des hommes pour dire : « Nous l’avons entendu prononcer des paroles blasphématoires contre Moïse et contre Dieu. » Ils ameutèrent ainsi le peuple, les anciens et les scribes, puis, survenant à l’improviste, ils s’emparèrent de lui et l’emmenèrent devant le Sanhédrin. Là ils produisirent des faux témoins qui déclarèrent : « Cet individu ne cesse pas de tenir des propos contre ce saint Lieu et contre la Loi. Nous l’avons entendu dire que Jésus, ce Nazôréen, détruira ce Lieu-ci et changera les usages que Moïse nous a légués. » Or, tous ceux qui siégeaient au Sanhédrin avaient les yeux fixés sur lui, et son visage leur apparut semblable à celui d’un ange.

Homélie de Basile de Séleucie, évêque

Orat. in sanctum Pascha, 1.2 : PG 28, 1082.1083

Le Christ se relevant d’entre les morts a fait de toute la vie des hommes une seule fête. Car transférant jusque dans le ciel la vie de ceux qui habitent la terre, il a donné l’élan pour se mettre en fête. Paul en est témoin, lui dont la langue fait entendre les paroles mêmes du Christ : Notre vie, dit-il, est désormais dans les cieux et c’est de là que nous attendons le Sauveur lui-même, le Christ Jésus. Or, quand on attend, ne se fait-on pas une fête de l’espérance même ? Qui donc, imaginant dans son esprit la venue du Seigneur, n’anticipe pas avec joie l’expérience de ce qui arrivera plus tard ? Qui, s’il entend dire que le roi revêtu d’un corps humain va descendre, n’élève pas sa pensée, ne réjouit pas son âme, devançant par la ferveur de son désir le temps où il le verra ?

Aujourd’hui, le Christ ressuscité des morts a été vu de ses disciples ; et même, par une seconde apparition, il a confirmé leur foi en la résurrection. Il a été vu, les portes fermées ; en effet, celui qui a démontré que l’enfer était sans remparts, n’avait pas besoin d’entrer par une porte ouverte ; car, lorsque Dieu ordonne, les lois ordinaires sont suspendues. Auparavant, le Christ avait marché sur le lac, et l’élément liquide s’était couché sous ses pieds de chair, les flots se laissaient mesurer aux pas de ses pieds, et la mer était devenue pour lui un plan solide.

Jésus entra, les portes fermées. Par contre, à l’heure de la résurrection, la pierre du tombeau fut roulée, la porte du monument ouverte. Il y a là une sorte de démonstration par analogie. Ce qui arriva au tombeau visible arriva aussi de façon invisible à l’enfer ; et une fois le tombeau ouvert, il était bien manifeste que la mort n’avait plus de portes. Il fallait, en effet, que le tombeau soit dépouillé en même temps que l’enfer et que les choses invisibles soient connues par celles qui se voient.

Du livre des Actes des Apôtres

Ac 5, 17-42

Alors intervint le grand prêtre, avec tous ceux de son entourage, le parti des Sadducéens. Pleins d’animosité, ils mirent la main sur les apôtres et les jetèrent dans la prison publique. Mais pendant la nuit l’Ange du Seigneur ouvrit les portes de la prison et, après les avoir conduits dehors, leur dit : « Allez annoncer hardiment au peuple dans le Temple tout ce qui concerne cette Vie-là. » Dociles à ces paroles, ils entrèrent au Temple dès le point du jour et se mirent à enseigner. Cependant le grand prêtre arriva avec ceux de son entourage. On convoqua le Sanhédrin et tout le Sénat des Israélites et on fit chercher les apôtres à la prison. Mais les satellites, rendus sur place, ne les trouvèrent pas dans la prison. Ils revinrent donc annoncer : « Nous avons trouvé la prison soigneusement fermée et les gardes en faction aux portes. Mais quand nous avons ouvert, nous n’avons trouvé personne à l’intérieur. » À cette nouvelle, le commandant du Temple et les grands prêtres, tout perplexes à leur sujet, se demandaient ce que cela pouvait bien signifier. Survint alors quelqu’un qui leur annonça : « Les hommes que vous avez mis en prison, les voilà qui se tiennent dans le Temple et enseignent le peuple. » Alors le commandant du Temple partit avec ses hommes et ramena les apôtres, mais sans violence, car ils craignaient le peuple, qui aurait pu les lapider. Les ayant donc amenés, ils les firent comparaître devant le Sanhédrin. Le grand prêtre les interrogea : « Nous vous avions formellement interdit d’enseigner en ce nom-là. Or voici que vous avez rempli Jérusalem de votre doctrine ! Vous voulez ainsi faire retomber sur nous le sang de cet homme-là ! » Pierre répondit au Sanhédrin, avec les apôtres : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Le Dieu de nos pères a ressuscité ce Jésus que vous, vous aviez fait mourir en le suspendant au gibet. C’est lui que Dieu a exalté par sa droite, le faisant Chef et Sauveur, afin d’accorder par lui à Israël la repentance et la rémission des péchés. Nous sommes témoins de ces choses, nous et l’Esprit Saint que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent. » En entendant cela, ils frémissaient de rage et projetaient de les faire mourir. Alors un Pharisien nommé Gamaliel se leva au milieu du Sanhédrin ; c’était un docteur de la Loi respecté de tout le peuple. Il donna l’ordre de faire sortir ces hommes un instant. Puis il dit aux sanhédrites : « Hommes d’Israël, prenez bien garde à ce que vous allez faire à l’égard de ces gens-là. Il y a quelque temps déjà se leva Theudas, qui se disait quelqu’un et qui rallia environ quatre cents hommes. Il fut tué, et tous ceux qui l’avaient suivi se débandèrent, et il n’en resta rien. Après lui, à l’époque du recensement, se leva Judas le Galiléen, qui entraîna du monde à sa suite ; il périt, lui aussi, et ceux qui l’avaient suivi furent dispersés. À présent donc, je vous le dis, ne vous occupez pas de ces gens-là, laissez-les. Car si leur propos ou leur œuvre vient des hommes, il se détruira de lui-même ; mais si vraiment il vient de Dieu, vous n’arriverez pas à les détruire. Ne risquez pas de vous trouver en guerre contre Dieu. » On adopta son avis. Ils rappelèrent alors les apôtres. Après les avoir fait battre de verges, ils leur interdirent de parler au nom de Jésus, puis les relâchèrent. Pour eux, ils s’en allèrent du Sanhédrin, tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des outrages pour le Nom. Et chaque jour, au Temple et dans les maisons, ils ne cessaient d’enseigner et d’annoncer la Bonne Nouvelle du Christ Jésus.

Homélie d’Eusèbe le Gallican, moine

Hom. 14, 1-2 : CCL 101, 165-166

Nous savons que le grand et admirable sacrement du baptême fut consacré dès les temps reculés de l’ancienne loi. De siècle en siècle, nul ne l’ignore : comme le bienheureux Moïse faisait sortir de la terre d’Égypte et du joug d’un indigne esclavage le peuple du Seigneur — nul ne l’ignore — pour faire passer au peuple la mer Rouge, l’abîme s’ouvrit, à la stupeur des éléments naturels. En premier lieu, étudions ici avec soin ce qu’un tel esclavage et un tel passage peuvent nous apporter d’édification. Car le bienheureux Apôtre dit : Tout cela fut fait en figure de ce qui nous arrive. Il confirme, par autorité d’en haut, que les signes et les miracles de ce temps-là se référaient aux mystères de la Rédemption future ; car il dit : Nos pères furent tous sous la nuée ; au temps de Moïse, ils furent tous baptisés dans la nuée et dans la mer.

C’est donc pour notre salut, oui, pour le nôtre, que la puissance divine, dès ce temps-là, bataillait en conduisant ce peuple : puissance divine merveilleusement riche en ses bienfaits, mais toujours plus riche encore dans l’accomplissement dont ces miracles étaient les promesses. Certes, le bienheureux Moïse fut le chef des Hébreux ; mais, dans la colonne de lumière et de nuée, c’étaient le Fils et l’Esprit Saint qui marchaient à leur tête. Ici, reconnaissons d’abord qu’un peuple docile à écouter ses chefs suit en réalité Dieu lui-même, et que par un homme de Dieu il parvient au salut ; donc les fils d’Israël qui devaient, par des voies difficiles, arriver au séjour du repos et du règne, ont obtenu la faveur d’être accompagnés par Dieu quand ils n’ont pas repoussé le gouvernement de Moïse, leur chef, et de leur prêtre.

Et il y a de bonnes raisons pour que l’ennemi n’ait pu les atteindre : la lumière a marché devant eux, les flots se sont épouvantés. C’est ainsi que le Prophète l’atteste en effet : Il menaça la mer Rouge, et elle recula, et encore : La mer vit et s’enfuit. Que vit-elle ? Exactement ceci : Qu’il faut croire au baptême. Sans nul doute, le terrible abîme fut horrifié devant le mystère de la majesté qui était là, et il céda la place à la puissance de son auteur. Fidèles à l’Écriture, laissons, nous aussi, derrière nous nos vices et nos crimes ; et que chacun de nous courre derrière le Christ, le cœur tendu vers lui. Le chrétien ne craindra pas le diable inventeur du péché. Car telle est la nature et la faiblesse de l’ennemi : quand tu t’éloignes de lui, il cède ; et derrière ton dos, si tu suis la loi du Seigneur comme les Hébreux suivirent Moïse, il est perdu. Cet ennemi-là, le fuir, c’est l’avoir vaincu.

Du livre des Actes des Apôtres

Ac 4, 32 – 5, 16

La multitude des croyants n’avait qu’un cœur et qu’une âme. Nul ne disait sien ce qui lui appartenait, mais entre eux tout était commun. Avec beaucoup de puissance, les apôtres rendaient témoignage à la résurrection du Seigneur Jésus, et ils jouissaient tous d’une grande faveur. Aussi parmi eux nul n’était dans le besoin ; car tous ceux qui possédaient des terres ou des maisons les vendaient, apportaient le prix de la vente et le déposaient aux pieds des apôtres. On distribuait alors à chacun suivant ses besoins. Joseph, surnommé par les apôtres Barnabé (ce qui veut dire fils d’encouragement), lévite originaire de Chypre, possédait un champ ; il le vendit, apporta l’argent et le déposa aux pieds des apôtres. Un certain Ananie, d’accord avec Saphire sa femme, vendit une propriété ; il détourna une partie du prix, de connivence avec sa femme, et apportant le reste, il le déposa aux pieds des apôtres. « Ananie, lui dit alors Pierre, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, que tu mentes à l’Esprit Saint et détournes une partie du prix du champ ? Quand tu avais ton bien, n’étais-tu pas libre de le garder, et quand tu l’as vendu, ne pouvais-tu disposer du prix à ton gré ? Comment donc cette décision a-t-elle pu naître dans ton cœur ? Ce n’est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu. » En entendant ces paroles, Ananie tomba et expira. Une grande crainte s’empara alors de tous ceux qui l’apprirent. Les jeunes gens vinrent envelopper le corps et l’emportèrent pour l’enterrer. Au bout d’un intervalle d’environ trois heures, sa femme, qui ne savait pas ce qui était arrivé, entra. Pierre l’interpella : « Dis-moi, le champ que vous avez vendu, c’était tant ? » Elle dit : « Oui, tant. » Alors Pierre : « Comment donc avez-vous pu vous concerter pour mettre l’Esprit du Seigneur à l’épreuve ? Eh bien ! voici à la porte les pas de ceux qui ont enterré ton mari : ils vont aussi t’emporter. » À l’instant même elle tomba à ses pieds et expira. Les jeunes gens qui entraient la trouvèrent morte ; ils l’emportèrent et l’enterrèrent auprès de son mari. Une grande crainte s’empara alors de l’Église entière et de tous ceux qui apprirent ces choses. Par les mains des apôtres il se faisait de nombreux signes et prodiges parmi le peuple… Ils se tenaient tous d’un commun accord sous le portique de Salomon, et personne d’autre n’osait se joindre à eux, mais le peuple célébrait leurs louanges. Des croyants de plus en plus nombreux s’adjoignaient au Seigneur, une multitude d’hommes et de femmes... à tel point qu’on allait jusqu’à transporter les malades dans les rues et les déposer là sur des lits et des grabats, afin que tout au moins l’ombre de Pierre, à son passage, couvrît l’un d’eux. La multitude accourait même des villes voisines de Jérusalem, apportant des malades et des gens possédés par des esprits impurs, et tous étaient guéris.

« Huit jours plus tard, Jésus vient »
(Jn 20, 19-31)

 

C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. » Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! » Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. » Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

 

Sermon de saint Grégoire le Grand, pape, sur l’Évangile

Sermo 45, 5 : CCL 41, 519-520

La première difficulté qui se présente sur cet évangile que nous venons de lire, c’est de savoir comment le corps du Seigneur a pu être un vrai corps après la résurrection et entrer, toutes portes fermées, là où se trouvaient les disciples. Mais il faut considérer que les œuvres de Dieu ne seraient plus admirables si la raison pouvait les comprendre, et que la foi n’a plus de mérite lorsque la raison humaine lui présente un élément de conviction. Or les œuvres de notre Rédempteur, qui nous paraissent incompréhensibles en elles-mêmes, se conçoivent mieux si on les compare à d’autres œuvres, de sorte que la foi en des œuvres admirables soit confirmée par des œuvres encore plus admirables.

En effet, ce corps du Seigneur est entré, portes fermées, là où se trouvaient les disciples, et c’est ce même corps qui, à sa naissance, se rendit visible aux yeux humains en sortant du sein clos de la Vierge. Qu’y a-t-il donc d’étonnant à ce que, après sa résurrection, il pénètre, toutes portes fermées, pour vivre éternellement, lui qui, en venant dans le monde pour mourir, est sorti, sans l’ouvrir, du sein de la Vierge ?  Mais parce que la foi de ceux qui voyaient ce corps visible était dans le doute, il leur a montré ses mains et son côté, il leur a donné de palper son corps qui était entré, portes fermées.

Ainsi il manifesta deux choses merveilleuses et contraires selon la raison humaine, lorsque, après sa résurrection, il montra son corps à la fois incorruptible et palpable. Car tout ce qui est palpable est nécessairement corruptible, et tout ce qui est incorruptible ne peut se palper. Mais notre Rédempteur, d’une façon admirable et inconcevable, fit voir un corps à la fois incorruptible et palpable ; ainsi, en montrant un corps incorruptible, il invitait ses disciples à penser à la condition qu’il leur promettait et, en montrant un corps palpable, il affermissait leur foi. Il se montra donc à la fois incorruptible et palpable, pour prouver qu’après sa résurrection son corps était de même nature, mais avec une nouvelle gloire.

Frères bien-aimés, craignez donc et pensez-y avec application. Nous célébrons maintenant les fêtes pascales ; mais il faut les vivre de manière à parvenir aux fêtes éternelles. Toutes les fêtes que nous célébrons dans le temps sont transitoires. Veillez donc, en célébrant ces solennités, à ne pas être séparés des solennités éternelles. À quoi serviraient les fêtes des hommes si on manque les fêtes des anges ? La solennité présente n’est que l’ombre de la solennité à venir. Nous célébrons celle-ci tous les ans pour parvenir à celle qui n’est pas annuelle mais éternelle.

Sermon de saint Léon le Grand, pape

Sermo 50, 3.6: SC 74, 80.82-83

Il n’y a pas de doute, mes bien-aimés, en prenant la nature humaine, le Fils de Dieu s’y est uni très étroitement, au point que, non seulement chez cet homme qui est le premier-né de toute la création, mais encore chez tous les saints, ce n’est qu’un seul et même Christ ; et comme on ne peut séparer la tête de ses membres, on ne peut pas non plus séparer les membres de leur tête. Que Dieu soit tout en tous, cela n’appartient pas à la vie présente, mais à la vie éternelle. Toutefois, même maintenant, il habite son temple, qui est l’Église, sans pouvoir en être séparé, comme il l’a lui même promis : Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps.

Tout ce que le Fils de Dieu a fait et enseigné pour la réconciliation du monde, nous ne le connaissons pas seulement par l’histoire du passé, mais encore nous en éprouvons l’efficacité par ses œuvres présentes. C’est lui qui, né d’une mère vierge par l’action du Saint-Esprit, rend féconde son Église très pure, en vertu de cet Esprit ; aussi, par l’enfantement du baptême, une foule innombrable de fils de Dieu sont engendrés, dont il est dit : Ils ne sont pas nés de la chair et du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu.

C’est en lui que la descendance d’Abraham est bénie parce que le monde entier se reconnaît en elle : le patriarche devient père des nations, lorsque naissent des fils de la promesse, non pas de la chair, mais en vertu de la foi. C’est lui qui, sans excepter aucun peuple, forme de toutes les nations qui sont sous le ciel un seul troupeau de brebis saintes, et qui accomplit chaque jour ce qu’il avait promis : J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie : il faut que je les conduise avec les autres. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau, un seul pasteur.

Il a dit à saint Pierre, le premier des apôtres : Conduis mes brebis. Mais celui qui régit la charge de tous les pasteurs, c’est le Seigneur seul ; et il nourrit ceux qui viennent vers la pierre, dans des pâturages si plaisants et bien arrosés que des brebis innombrables, fortifiées par la richesse de son amour, n’hésitent pas à mourir pour le nom de leur pasteur, de même que le bon pasteur a daigné donner sa vie pour ses brebis. C’est à lui, c’est à ses souffrances que s’associe non seulement l’héroïsme des martyrs, mais aussi la foi de tous les fidèles qui renaissent, et cela dans le sacrement même de leur régénération.

De la Lettre aux Colossiens

Col 3, 1-17

Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d'en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu. Songez aux choses d'en haut, non à celles de la terre. Car vous êtes morts, et votre vie est désormais cachée avec le Christ en Dieu : quand le Christ sera manifesté, lui qui est votre vie, alors vous aussi vous serez manifestés avec lui pleins de gloire. Mortifiez donc vos membres terrestres : fornication, impureté, passion coupable, mauvais désirs, et la cupidité, qui est une idolâtrie ; voilà ce qui attire la colère divine sur ceux qui résistent. Vous-mêmes, vous vous conduisiez naguère de la sorte, quand vous viviez parmi eux. Eh bien ! à présent, vous aussi, rejetez tout cela : colère, emportement, malice, outrages, vilains propos, doivent quitter vos lèvres ; ne vous mentez plus les uns aux autres. Vous vous êtes dépouillés du vieil homme avec ses agissements, et vous avez revêtu le nouveau, celui qui s'achemine vers la vraie connaissance en se renouvelant à l'image de son Créateur. Là, il n'est plus question de Grec ou de Juif, de circoncision ou d'incirconcision, de Barbare, de Scythe, d'esclave, d'homme libre ; il n'y a que le Christ, qui est tout et en tout. Vous donc, les élus de Dieu, ses saints et ses bien-aimés, revêtez des sentiments de tendre compassion, de bienveillance, d'humilité, de douceur, de patience ; supportez-vous les uns les autres et pardonnez-vous mutuellement, si l'un a contre l'autre quelque sujet de plainte ; le Seigneur vous a pardonné, faites de même à votre tour. Et puis, par-dessus tout, la charité, en laquelle se noue la perfection. Avec cela, que la paix du Christ règne dans vos cœurs : tel est bien le terme de l'appel qui vous a rassemblés en un même Corps. Enfin vivez dans l'action de grâces !

Homélie de saint Grégoire le Grand, pape, sur l’Évangile

Hom. 25, 1.2: PL 76, 1189-1190

Après avoir été une pécheresse publique, Marie Madeleine effaça par ses larmes les souillures de sa faute en aimant la vérité. La parole de la Vérité s’est réalisée : Ses nombreux péchés lui sont pardonnés parce qu’elle a beaucoup aimé. Celle que son péché laissait autrefois de glace, brûla d’amour par la suite. N’ayant pas trouvé le corps du Seigneur à son arrivée au tombeau, elle crut qu’il était enlevé et elle en porta la nouvelle aux disciples. Arrivant à leur tour, ceux-ci constatèrent et crurent que tout correspondait à ce que disait cette femme. Le texte ajoute alors à leur propos : Les disciples s’en retournèrent chez eux, et au sujet de Marie : Marie cependant se tenait près du tombeau, dehors, tout en pleurs.

En l’occurrence, il faut bien mesurer avec quelle force l’amour embrasait l’âme de cette femme, qui se refusait à quitter le tombeau même après le départ des disciples. Elle cherchait celui qu’elle n’avait pas trouvé, pleurait en le cherchant, et embrasée par l’ardeur de son amour, brûlait de désir pour celui qu’elle croyait enlevé. Une première conclusion s’impose : celle qui était restée pour le chercher fut seule ensuite à le voir. De toute évidence, la persévérance est une qualité de la bonne action : Celui qui persévérera jusqu’à la fin, dit le Seigneur, sera sauvé.

Or tout en pleurant, Marie se pencha pour regarder dans le tombeau. Déjà elle avait vu le tombeau vide, déjà elle avait annoncé l’enlèvement du Seigneur ; pourquoi se penche-t-elle de nouveau et de nouveau cherche-t-elle à voir ? Mais à qui aime, avoir regardé une fois ne suffit pas, car l’intensité de l’amour multiplie le désir de la recherche. Elle avait donc cherché une première fois sans trouver ; elle persévéra dans sa recherche et il advint qu’elle trouva ; et il arriva que les désirs différés s’avivèrent et qu’avivés ils saisirent ce qu’ils avaient trouvé. Car l’attente fait grandir les saints désirs. Si l’attente les fait tomber, ce n’étaient pas de vrais désirs. C’est d’un tel amour qu’ont brûlé tous ceux qui ont pu atteindre la vérité.

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