4e dimanche de Pâques (I)
Sermon de saint Bernard, abbé
Sermo in Dom. infra Oct. Assumpt., 3 : EC 5, 263-264
Ne crois-tu pas que Marie est cette femme revêtue du soleil ? Je le concède sans peine : l’ensemble de la vision prophétique vise clairement l’Église du temps présent, mais elle me paraît s’appliquer sans aucune inconvenance à Marie. Celle-ci de fait s’est revêtue comme d’un nouveau soleil. Comme le soleil se lève indifféremment sur les bons et les méchants, ainsi Marie ne discute pas les mérites passés, mais se montre à tous exorable, à tous extrêmement accueillante ; elle prend en pitié enfin les besoins de tous dans une tendresse sans bornes.
Aucune imperfection qui ne soit au-dessous d’elle, et tout ce qui est fragilité ou corruption, elle le domine plus que quiconque d’une hauteur en quelque sorte inaccessible ; elle dépasse ainsi les créatures, ce qui permet de dire en toute vérité que la lune est sous ses pieds. D’ailleurs, qu’avançons-nous d’extraordinaire en disant : La lune est à ses pieds, puisque c’est un crime de mettre en doute son exaltation au-dessus des anges, plus haut encore que les chérubins et les séraphins.
De plus, dans le soleil, l’ardeur et la clarté sont constantes, dans la lune, il n’y a que la clarté, encore est-elle changeante et incertaine, jamais fixée dans le même état. On a donc raison de représenter Marie enveloppée de soleil, elle qui s’est enfoncée dans les abîmes de la divine sagesse jusqu’à des profondeurs incroyables, au point qu’elle nous apparaît immergée dans cette lumière inaccessible jusqu’au degré possible pour une créature ne jouissant pas de l’union hypostatique.
Ce feu, chacun le sait, est celui qui purifie les lèvres du prophète, ce feu est celui qui embrase les séraphins. Pour Marie, il s’agit d’une toute autre mesure : elle a mérité d’être, non pas simplement effleurée par ce feu, mais bien d’en être recouverte de toute part, d’en être environnée, d’être comme enfermée dans ce feu même. Il est toute splendeur bien-sûr, mais aussi l’incandescence suprême, le vêtement de cette femme dont tout l’être se trouve irradié avec tant d’excellence qu’on ne peut découvrir en elle le moindre soupçon, je ne dis pas de ténèbres, mais de pénombre ou de lumière moindre, et pas davantage le plus petit atome un peu tiède ou qui ne soit pure incandescence.